Du miel isérois... au miel sans miel

04/09/2019
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Cette année encore, la production de miel est désastreuse en Isère, comme presque partout en France et dans la plupart des pays du monde.

En Auvergne-Rhône-Alpes, où l'État vient de déployer un Observatoire des Mortalités et des Affaiblissements de l'Abeille, 80% des apiculteurs et apicultrices professionnel-le-s déclarent une récolte de miel de printemps nulle, avec la disparition de plus de 1200 colonies d'abeilles. (Dauphiné Libéré, 11/07/2019).

Pourtant, les rayons de Leclerc Comboire, de Géant Casino Saint-Martin-d'Hères ou de Carrefour Meylan regorgent de pots de miel, à des tarifs souvent très bas, parfois dérisoires.

Comment est-ce possible ?

Une réponse se trouve peut-être dans un livre de Christophe Brusset, ancien cadre de l'industrie alimentaire, qui en 2015 révélait dans Vous êtes fous d'avaler ça ! des techniques de fraudes massivement utilisées.

ici Grenoble vous propose une synthèse du chapitre consacré au miel :

Selon Christophe Brusset, au moins 20 à 30% du miel vendu en grandes surfaces et importé de l'étranger ne serait pas du miel, et seule une infime partie du miel vendu dans ces magasins serait du miel pur.

Pourquoi ? Comment ?

Christophe Brusset nous présente cinq méthodes de fraudes couramment utilisées :

1. Mélanger le miel avec de l'eau. Le miel ayant des propriétés antibiotiques "naturelles", il est possible d'y injecter jusqu'à 18% d'eau. Si malgré tout l'eau se met à faire fermenter le miel, celui-ci peut être pasteurisé. C'est l'une des raisons pour lesquelles certains miels ont un goût d'alcool ou de levure...

2. Mélanger le miel avec une solution d'eau et d'antibiotiques, pour éviter toute fermentation. Cette technique permet d'ajouter jusqu'à 20 à 30% d'eau dans le miel.

3. Mélanger le miel avec du sirop de glucose et du sirop de fructose, dont les coûts de production sont très faibles. Cette méthode semble massivement utilisée. Le seul problème "commercial" est que ce mélange a tendance à cristalliser plus vite que le miel pur.

4. Ne pas mettre de miel, mais simplement mélanger du sirop de glucose, du sirop de fructose, du caramel et des arômes de miel. Le problème est que cette fraude peut se détecter assez facilement par des analyses scientifiques.

5. Faire le même mélange que précédemment, mais avec des sirops de glucose et de fructose spécialement élaborés pour imiter le miel, et y ajouter des micro-particules de grains de pollen. Cette fraude semble quasiment indétectable.

Notons que les révélations de Christophe Brusset sont en partie confirmées par une enquête du média Reporterre en 2017 et par le rapport mondial sur les matières premières Cyclope 2019.

On comprend mieux, dans ces conditions, l'abondance et les tarifs si bas du miel dans la plupart des hypermarchés.

À propos des sirops de glucose et de fructose

Mais au fait, comment sont fabriqués les sirops de glucose et de fructose, cet ingrédient "magique" que l'on retrouve dans presque tous les produits industriels ?

Le sirop de glucose est fabriqué avec de la farine de maïs ou de blé à laquelle on ajoute des enzymes OGM, des "alpha-amylases", qui transforment les "sucres complexes" des céréales en "sucres simples". L'avantage commercial est énorme, puisque 60 grammes de sirop de glucose ont le même pouvoir sucrant que 100 grammes de sucre de canne ou de betterave, pour un prix de production incomparable.

Le procédé est le même pour fabriquer du sirop de fructose, mais avec des enzymes OGM différentes, les "glucose-isomérases".

Selon Christophe Brusset, l'omniprésence de ces sirops pour sucrer les produits à bas coût et leur donner plus d'appétance pourrait être l'une des causes de l'augmentation en flèche des diabètes dans les pays industrialisés. Le diabète de type 2 aurait ainsi doublé en 20 ans, concernant désormais 10% des adultes.

Par ailleurs, toujours selon Christophe Brusset, les sirops de glucose et de fructose seraient suspectés d'augmenter notre sécrétion de ghréline. Cette hormone stimule notre appétit, et ainsi notre "addiction au sucre". Ceci pourrait expliquer les fringales irrésistibles de biscuits, de sodas et de friandises qui touchent de nombreuses personnes, et qui ressemblent en partie à la dépendance au tabac.

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Cette synthèse du chapitre sur le miel vous a intéressé ?

ici Grenoble vous propose également une synthèse des chapitres sur les jambons, les crevettes, l'origan, le thé, le piment, les champignons et le safran.

Pour la découvrir, c'est ici.

Photo de Une : Un apiculteur Playmobil regarde ses pots de miel vides (DR)